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Post-scriptum
La folie est peut-être un chagrin qui n'évolue pas
Cioran
Sentimur experimenturque nos aeternis esse
Nous sentons et nous expérimentons que nous sommes éternels
Spinoza
AMNISTIE
(" oubli " en grec)
Encore un message de Caroline, bref, encore un qui m'agace. Je suis
certain en moi qu'elle m'aime, en tout cas plus que ce faux frère
idiot et illettré de Cyril. Ce jeu de l'initiation, de "
l'a-communication ", m'énerve à me tordre en mille.
Je suis moins actif sur la revue et surtout, je blesse autour de moi,
Isabelle, perdue, définitivement. C'est mieux ainsi. Claire,
toujours si douce, si tendre et si blessée, par mon absence,
ma réticence. Mon éloignement. Ma distance. Perdition
absurde, Caroline ne vaut pas un quart de mon chagrin.
Amnistie, je réclame. Ce matin, n'ayant pas eu le temps, pour
des raisons diverses, dont un ordinateur hors batterie (mon câble
étant resté au travail), j'eus envie de lui répondre,
garde-le ton texte à la con, et va te faire enculer, chose que
Cyril a déjà dû te faire. Marre, de gâcher,
mes jours et ceux de douces personnes pour une idiote. Nulle autre insulte
pour toi. Idiote te va à ravir.
The end
Je prie
de ne jamais revoir ce pauvre Cyril, qui pour quelques illusions, a
perdu une amitié. Caroline restera un prénom, le prénom
de la bêtise de la passion. Petite sotte, petite idiote. Pense
à ta sœur, quoi, les voyeurs du Net, respecter ta vie privée,
imbécile, tu es venue à moi par le Net, tu m'as harcelé
des mois par le Net. Idiote. Tu ne mérites rien de mieux que
ce que tu as. Ce que tu as, c'est RIEN.
Je suis
sur le marché de Coulommiers, je gambade en attendant le train.
Retard je serai aujourd'hui au travail. Je me disais la veille, après
l'article du journal local, que je ne mettrais pas les pieds à
Coulommiers avant une bonne quinzaine. Et les choses de la vie. Font
que je m'y retrouve ce matin. Je salue Thiercelin, mon prof d'économie
de mes années B. Passe chez Pablo, tous les Bordel ont été
vendues. Dans un détour d'échoppes, peu après une
boutique cosmétique où j'ai bien remarqué le regard
coquin, d'une coquine, que j'ai connu élève, m'a-t-elle
vu dans le canard, elle se marre, glousse, frimousse espiègle,
yeux bleus qui brillent jusqu'à ma lointaine myopie, j'imagine
ses fesses rebondies, de ce carrefour en contre bas, je souris et mots
échangés avec Nadège, enseignante et tennis woman.
Ma route continue. Jusqu'à la gare. C'est aujourd'hui que je
dis MARRE.
Ce début
de jour écrit ce midi, puis, le travail appelant, les autres,
les mots qui suivent sont ceux du soir. C'était donc ma journée
MARRE. Je suis devin. Divin, aussi. Je suis au-delà.
A la gare,
sur le quai. Je guette. Je fouine la chafouine. Je traque la belle.
Je me sens bien avec l'idée de lui dire " va te faire enculer
". Une sorte de délectation d'être libéré
après avoir fait du gnouf pour un crime que l'on n'avait pas
commis. Caroline, MARRE.
Camille. Passe. Fend le vent. L'espace. La géométrie féminine.
Dora rochelienne. Martine Carole laurentienne. Mes premiers textes sur
son sourire, ses délices loukoums. Je discutais avec Marina,
encore une prof. C'est la série, à Coulommiers, il y a
que des profs. Ou bien je ne connais que ça. J'essaie de la rejoindre,
inspecte les wagons. Camille, vingt ans, j'apprends, longue chevelure
blonde, reflets d'or, de trucs bateaux de poète, étoiles,
blés, soleil… Jolie sourire, un brin défaut, pour
encore plus beau. Mature, décidée, décidément
une déesse. Parfums, Sepphora, Dora, Séraphin, ange, unique
loi. Femme d'or. Femme Dore. Volcan. Irruption. Unique loi, dit le buisson
ardent. Celle des dents, des hanches, des seins, de l'essence, des sens,
du son enfoui tout en nous, chacun.
Au travail, le sourire de mes amis. Olivier, Philippe QUI SE MARRIE
LE 26 PROCHAIN. Que je suis heureux. Bonheur de lire son mail hier avant
de me coucher. Bonheur. Qui touche. Qui flambe. Nos cœurs. Franck,
Christophe, Abder, Guillaume. Sourires. Vincent. Aussi.
Mon père m'annonce un trois quart de page dans le SUD OUEST.
Belle photo, moi avec ordinateur, revue et bétonnière.
Il m'envoie l'article, élogieux. Vive la presse régionale
!
Je recevrai mon premier texte issu de la parution de cet article réjouissant.
Je vais encore être noyé de mails, de textes, de l'émulation,
bordel !
Claire, encore, toujours, ma douce, qui me comprend, m'attend, et moi,
suis odieux, distant, silencieux. J'ai besoin de me retrouver, celui
qui observe les femmes, les dévore, les écris. Là,
je ne crie plus rien. Je réponds à ces messages, désormais
je suis connecté. Sur le réseau. Loin du ferroviaire.
Enfin.
…
MARRE, le vin Madiran, Atmosphère, treize heures, Olivier, Franck
et trois escalopes de veau normandes avec spaghettis au beurre. Viticulteur,
David Capmartin, je crie : MARRE, Capmartin, ville où habite
Caroline. Pas si mauvais ce vin, d'ailleurs.
…
Céline, copine de Franck, désormais épistoleros
ponctuels, me donne rendez-vous pour un déjeuner au Chéri(e)…
Branchouille, hype, parissi mon amie… Sur parissi.com, que Franck
ne connaissait pas, il tombe sur la photo de Cyril. Je le trouve laid,
mon bel ami. Limite du dégoût. De notre amitié,
de nos confidences, tout cela n'était que méprise. Je
suis un enfant qui apprend que les amis, ça trahi.
Je ne trahis jamais (Serais-je point un ami ?). Mais je pardonne rarement.
Les Ganelon. Durandal brisée. Je me bats et ne meurs pas. Barde,
barde, Taïaut !
Sus à l'ennemi !
…
Dans le métro, assis, à ma droite, une beauté andine,
hispanique, Zia… Dessin du profil, prolixe en rêves béats.
Un type en face de moi, en face d'elle donc, la mange du regard berbère.
Kabyle affamé. Ma déesse inca. Ima sumac. La beauté
à jamais cachée, mystérieuse, comme dans la vie,
une laideur prend place entre elle et moi. Je descends à Odéon.
La moche aussi. Evidemment. Me cachant la vue génuflexante de
mon beau profil d'or. La moche disparue, c'est ma myopie qui me floue.
…
Une femme dans la rue, longues jambes, qui partent arrivent descendent
montent, de deux quartiers d'orange fermes, fruités. Je comprends
si bien Truffaut. Oryx. Gazelle. Antilope. Impala. Compas. Ciseaux.
Paire de jambes, paire de fesses, forment un ciseau, qui découpe
en copeaux ma chair. Striant mes envies de raison.
…
Rue de Bretagne, je pense à ce que je vais dire à Gaspar
N. Déluge de mots en moi, en tête. Je sens le sens du destin.
Une silhouette approche. Décolleté altruiste. Les yeux,
les reconnais, malgré les cernes. Draghixa. Egérie de
tant de branlettes. D'érotiques projections. Seule chose que
je trouve à dire, tout en pointant l'index vers le ciel, "
oh yes ! ". Je ne l'accoste pas, la laisse partir vers Réaumur.
Droit dedans, je cours la tête. J'avais des choses à lui
dire, c'est pas comme si… Connais Silmarils, patron de Bordel,
ami d'Estelle, un peu de Marc D. aussi, au Hustler. Et pis, je suis
un charmant interlocuteur, en général, on me trouve sympathique.
Ah, c'est le regret de la soirée, ça va me torturer toute
la nuit. Pourquoi avoir laissé passée la belle au visage
triste. N'est-ce pas Philippe. Qui compatit avec cette piqûre
de regret. Demandons donc à Virginie D.
…
ça me fiche un coup, je suis comme un fou… Quatre
mails de Caroline, je réponds dans l'ordre, du dernier au premier
je crois… elle revient, sur… c'est moi qui voulais qu'elle
parte, j'avais fait ses valises, ai dit à Cyril de l'emmener.
Avais-je le choix ? Elle le voulait, l'avait manigancé, m'avait
manipulé. Avec ces " je t'aime ", l'a-t-elle dit aussi
à ce pauvre Cyril ?
Elle m'agace, lui dis que je voulais en finir avec elle, aujourd'hui.
Et BAOUM, le comble de l'ignominie. Le quatrième mail ouvert.
" Acte manqué "… blabla… s'excuse. Elle m'a
forwardé sa réservation de voyage avec Cyril pour le Sénégal
le 23 prochain !
Sa méchanceté est inimaginable. Comment peut-on faire
cela ? Ce pauvre Cyril prit dans ce piège, profite, baise, défonce,
mon ex-ami, mon simple idiot. Je lui ordonne de ne plus m'écrire.
Elle vomit crapauds et serpents…
Je sors dîner Japonais, en apnée, en chantonnant Haendel.
Sifflotant. Je me sens libéré. Mais quelle monstruosité.
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