La veille Pascal m'avait parlé de Nassif, comme un spécialiste de la "hype", comme un allumé des trucs New Age. Je vais pouvoir m'en rendre compte moi-même. Nous déjeunons ensemble.
Je descends à la station "Arts et Métiers", je ne sais plus trop le nom du rencard. Je trouverai bien, en matant les enseignes, ça va bien revenir. Je fais un premier tour, dans la mauvaise direction, comme de bien entendu.
Je tombe sur le "Léonard", la consonance est bonne. Je pense que c'est là. Je m'accoude et commande une Leffe, timidement.
13h35, je borborygme et j'ai des doutes. Je sors et l'appelle. Il arrive, je suis bien au bon endroit. Je fais style d'arriver avec lui. Je le reconnais tout de suite, moins triomphal que dans mon souvenir de la soirée "Panik". Il m'avait fait penser à Sandokan, le tigre de Malaisie, avec sa crinière flamboyante et son regard émeraude.
Bref, c'est un petit gars sympa qui se pointe. Discret et poli. On s'installe dans un coin, dans un renfoncement.
J'attaque la conversation, sur les questions initiales pointées sur la polémique "Merdeux en France", sur Cancer et les autres revues.
Je lui dis qu'avant son article j'ignorais tout de Chronic'art et Immédiatement, que je connaissais Cancer par Frédéric Vignale. Que j'avais envoyé des textes, refusés, pour la sortie d'un livre de "Têtes de turc". Que je pense que son texte a "légitimé" ces revues, qu'il trouve plus ou moins dangereuses, et que son truc de "céliniensituationniste" plus célinien que situationniste est un peu un réchauffé des rouges-bruns.
Il me dit qu'il ne souhaite pas en parler, qu'il voulait clairement marquer les positions de la revue, de ses choix politiques, "Technikart" n'est pas de droite, dit-il.
Mais on parle aussi de sa petite fille, de ses crayons salissants, de Régis Clinquart avec qui il a fait de la boxe française à Sciences Po, de Christophe Mouton, aussi à l'IEP, qui bosse à BETC, de Charles Pépin et de son beau livre, qu'il a lu, "mieux écrit que le premier", un must de septembre pour lui. Il est très sympathique en fait.
Yann ne m'en avait pas parlé en bien. D'ailleurs nous parlons de leur "rupture", ils étaient très potes rue du bac. Mais il y eut des désaccords, des reproches mutuels. Je ne me mouille pas plus sur le net.
On en vient à la revue, à son concept flou et fou, à son exubérance textuelle... Et à son eterview, parlons de la hype.
Je vois bien que la définition est ardue, "première étape du capitalisme", "ce qui est hype aujourd'hui se retrouvera au BHV dans 2 ans"... Mais c'est dur à définir.
Lupen-prolétariat de la création ? C'est plus complexe pour lui. Ça touche à l'idée de bonheur, dans un monde pourri, absurde, cruel où l'underground est un outil du capitalisme.
Le Xe envahit par les bobos, hypsters, et hop les prix flambent, "Prune" est hors de prix et on skate sur les bords du canal Saint-Martin. Idem pour Oberkampf, avec l'installation du branchissime café "Charbon" et de son "Nouveau Casino".
La discussion est passionnante, le type est patient, intéressé, chaleureux dans ses propos, de ses rêves d'écriture à la campagne. Nous avons les mêmes perspectives.

On se quitte. Il doit répondre aux questions que je lui enverrai, soit avant le 12 juillet, son départ en vacances, soit en août, à son retour.

Vers 20h30, je dois rejoindre Rodolphe et Sébastien au "Charbon", à Oberkampf. Drôle, c'est la première fois que nous y avons rencard.
Je suis en retard. J'appelle Roudoudou, il est déjà sur place. Il m'attend. Je téléphone ensuite au petit Sébastien, il est encore chez lui ; il est avec son prof d'archi, ils picolent semble-t-il.

Je cours, me faufile dans la masse, m'évadant de celle-ci, m'échappant à vive allure... Raccourcis, je me perds, j'accélère le pas, la course. Je n'aime pas faire attendre les amis.
Je déboule en furie au café, personne. Je rentre, je sors, je regarde bien. Mais pas de Rodolphe.
Je lui phone. Il me dit qu'il y est déjà. Hein ? Oui, il s'est trompé. Il est à côté "du clavier", le cyber-Roudoudou.
Je le rejoins, et nous partons terrasser au Charbon en attendant Sébastien. Ce dernier se pointe assez rapidement. Ici commence une bien belle terrasserie.
La serveuse est mignonnette, avec de tout petits yeux rieurs, de légers traits comme dans les mangas. Sébastien commande un verre de vin, "le moins cher", Rodolphe, un Casanis, pour changer (alors que sur la carte, il n'y en a pas) et un Ricard pour bibi.
Elle revient avec le plateau, un verre de vin, un Ricard et un Pastis. Elle n'a pas de Casanis et s'en excuse. Nous le savions déjà.
On sort notre argent, ici on paie cache, pour ne pas s'enfuir sans payer. La veille, Sébastien m'avait parlé d'une pièce de "10 F" qu'il avait malheureusement récupéré. Et crapule comme il peut l'être, il la file à la jolie jeune souriante. Elle capte de suite et couche le petit père !
Sébastien propose de convoquer Pascal, Le "Jouq'", le thésard de termites. Il est avec sa copine, justement, dramatiquement, tragiquement.
Il accepte de venir avec sa belle. On plaisante sur le fait qu'il est super coincé quand sa copine est là. On va se gaver.

Ils nous rejoignent. Calmement. Sereinement dirai-je. Elle est souriante la "réac vendéenne". Je lourdise sur le fait qu'elle soit de droite, en rajoutant dans les propos. Sur la peine de mort, sur l'avortement, comment peut-on être contre la peine de mort et pour l'avortement ? Cela n'a aucun sens. Je m'emballe, vocifère des idées provocatrices. Cela m'amuse de voir la tête déliquescente de Pascal.
Je balance à Rodolphe, en stage, quelques "tu vas te faire sucer tout l'été", "ah non, pardon, te faire fellationner tout l'été"... ça rit gras, ça rit lourd, ça rit quoi.

J'avais pensé aller au "Mobil Home", le bar associatif où je picole avec Régis et sa bande, Mathias et Flo. Justement Willy m'appelle. J'en profite pour lui demander si le bar prend de nouveaux adhérents. Seulement deux. Nous sommes quatre.
Tant pis. On ira manger au "Cannibale" et voir Fafa. Pour faire plaisir à Rodolphe.

En fin de compte, le couple excédé par notre lourdeur nous quitte. Entre temps, Sébastien a tenté de refiler ses dix balles à un vendeur de fleurs et s'est fait prendre. On a bien relouté la gentille serveuse en vannes craignos.
Il a accosté une fille assise derrière, "qu'est-ce que vous buvez là ?". Et ça marche.
Pour blaguer, avec Rodolphe, on fait mine de partir. Mais le jeu est plus que crédible et Seb doit abandonner sa belle, qui le salue d'un "j'aurais bien fait ta connaissance".
Je me sens un peu responsable de la mine triste de mon copain.

Il attrape une crêpe dans un boui-boui crasseux. Rodolphe est au tabac. Je lui dis qu'il peut retourner au bar s'il le souhaite, qu'on le rejoindra après. Il trouve que c'est un bon plan.
On trottine jusqu'au resto, c'est bondé. Des types attendent pour des tables. On salue Fafa et on se casse.
Sur le chemin, on croise Seb tout pensif ; la fille n'était plus seule. Il suffit d'un quart d'heure, d'un espace laissé vacant et la fille se volatilise.

On se met d'accord pour le Sherkan. C'est bon le Sherkan. Le dîner est tranquillos, le serveur, super sympa.
On paie. Deux filles discutent, plutôt mignonnes. Seb attaque, "vous aimez les chats ?". Elles parlaient de chats. Seb n'a pas manqué l'occasion.
Elles accrochent rebondissent. On hallucine. Quel talent !
La discussion : chats, chiens, chevaux, moutons. Elles sont bien sympas, une petite brune très "fille bien élevée", qui me plaît plus, et une blonde bien charnelle, avec un joli regard, provocateur, complice, coquin.

On part tout de même rejoindre Régis, Mathias et Flo au "Timbaud". On est bien reçu au Timbaud, serveur tarlouze bien cool. On anise un petit Ricard. Les amis se pointent. Il manque Régis, au téléphone avec sa belle.

Mathias m'appelle "Touquin". Il lit ce journal et connaît les aventures de mes deux potes. C'est drôle, ces derniers s'en foutent. Je suis leur pote délires et gros vanneur. Régis charrie Rodolphe sur nos parties de tennis (lu sur le net), c'est délirant.
Mathias part en philosophie avec Seb et Rodolphe. Flo ne reste pas longtemps. Régis me parle de sa révélation amoureuse, Annette. Un week-end SM, avec Gang et tout l'attirail, qui finit en passion amoureuse. Excellent.
Ça risque de raccourcir "Romance" tout ça !