Lundi
10 février, R.I.P Max Pecas. Nous
sommes mardi, et jai revu la belle inconnue du bus et du RER.
Elle a ouvert ses yeux à larrêt de Touquin, précédé
par une coiffeuse filiforme et teintée, souriant, jai dit
" salut ". Grand sourire, lui aurais-je aussi manqué
?, puis fermeture des petites perles de bonheur. Je nétais
pas assis bien loin, près de ma brindille, je nosais pas
parler trop fort. Au RER, je suis ma mignonnette coiffeuse, je ne pense
quà elle. En tête la musique de Matrix, n°4 sur
lalbum, celle de cette version doublement vu du " Misanthrope
", celle qui me fait menvoler assis tout près dune
fille à petits nichons, petit cul et petite tête. Moi,
petite bite. Je pense à ce " crapaud " de Marjo, je
me dis quelle conne, quelle petite conne, est-ce elle qui était
sur la terrasse avec Thomas, a-t-elle mis sa langue, si assassine, dans
la bouche de mon doux ami, petite conne. Je narrive pas à
te haïr. Je pense même te déposer un A.R.I un matin
sur ton bureau, premier à gauche au premier étage de l'agence.
Allez-y mes amis, régalez-moi de vos surprises. La fille descend
à Val dEurope, je descends aussi. Pour remonter au wagon
prochain, là où se trouve la belle danseuse trop connue
désormais. Je prends un strapontin dans son dos. Je ne veux pas
quelle me voie. Je lis, le livre de Martin, récit doux-absurde,
très joliment triste, délicieusement nostalgique. Je débute
la lecture, et je suis agréablement surpris de trouver une histoire
si douce, aigre, rigolote, bien triste en sorte. Elle aussi me quitte,
je sens son regard sombre sur moi. Elle est belle debout. Prééminence
de la danseuse sur la bêcheuse commune. Je replonge dans le bouquin.
Je me dis, merde jeudi tu ne prendras pas le train, tu seras déjà
à Paris, on peut pas dire que tu lui bouffes loxygène
à celle-ci. Des mois à lobserver. Je ne veux pas
laccoster comme ça, je veux être un mec bien avant.
Je ne le suis pas. Je nai rien fait de Bien. Je
me sens minable jusquà la fin de la journée, jusquau
train. Dans le train, je materai le film de Lynch, je me dis ça
pour me donner du baume au cur, chasser cette odeur mortifère.
Dans le train, je retrouve Nicolas, nous regardons ensemble le début.
Puis, jenchaîne seul dans le bus, dans les places du fond,
comme un mauvais garçon. Laura E. Harring est le portrait idéal
de mon " Héloïse ", quelques années en
plus. Le
gentil chauffeur me dépose au stop, ma grand-mère ma
râpé des carottes, Maurice ronfle de grippe dans le canapé.
Je narrive pas à me nettoyer le corps, à lintérieur.
Je narrive pas à me dire chouette, regarde tu as déjeuné
avec une chouette jeune fille, tu as reçu de bien gentils mails
de Juliette, tu as de la chance mon grand. Je ny arrive pas. Je
suis un homme de débâcle, nest-ce pas redge, qui
matrophie dun " i ". Je
regarde la fin de Mulholland drive, dans mon évier des chaussettes
baignent dans un jus adoucissant. Que penser de ce film, hormis la métaphore
simple des rêves brisées des jeunes actrices se rendant
à Hollywood, si interchangeables, une fois serveuse, une fois
star, des noms qui se zappent si facilement, serveuse Diane ou Betty,
lactrice choisie, Betty, Camilla. Hollywood, boîte à
Pandore. Le cinéma est une illusion, Sunset Bld est la rue de
la maison dHoudini, " Silenzio " est le dernier mot
du " Mépris ". Etrangement, je pensais à Godard,
au " Mépris ", au début du film, je ne sais
plus pourquoi. Le mot me fut soufflé en synchronisation avec
la somptueuse brune, courte et légère prémonition.
Quelle beauté, ultime hommage à Gilda, aux héroïnes
années 50, aux beautés hitchcockiennes, hawksiennes
SILENZIO
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