Le
petit hobbit est assis devant, frisotté au blé d’or
et au regard vicelard d’un détenu de longue durée.
J’ai la tête plongée dans le Tech du mois. Je le feuillette.
Je me demande bien pourquoi je l’achète toujours. Pour l’institution.
Qu’est-ce que c’est con ce que je viens d’écrire,
Technikart serait une institution, bâtie sur un socle beigbedo-williamsien…
Il n’en reste plus grand-chose. Le
petit hobbit me tend son écouteur, en général,
il s’extasie sur un best of de Bon Jovi, et là, non, sur
une reprise des gars de NRJ, m’apprend-t-il, de à la queue
leu leu de Bézu… Je garde quelques secondes, de politesse,
et hoche la tête, de réciprocité, et me replonge
dans ma alibi technikart. Il
a toujours dans son sac : Lorsqu’il
a un coup de blues, il plonge dans ce classeur et se baigne dans le
visage angélique de la petite Portman ; les belles femmes ne
peuvent être que l’image de la jeune fille. Je
ne suis pas mieux loti que ce petit bonhomme. Je cristallise pitoyablement
sur un bras déployé par une inconnue, si proche, je noie
de mails absurdes la petite Laine, qui visiblement se fout bien de moi,
je me fourvoie à rencontrer des filles inconnues, je fais n’importe
quoi. Comme toujours, comme pour Ingrid, comme pour Olivia, comme pour
Fanny… Ce
midi, j’ai déjeuné avec Frédéric Grolleau.
Il m’a offert et dédicacé à la plume de cristal,
et à l’encre de Venise son livre Monnaie de verre. Et
tout redeviendra poussière. Emporté par les vents chauds
du désert : Khamsin, Simoun et Sirocco. Il
faut que je me sorte Laine de la tête, c’est une obsession
vaine, égoïste, et perturbante. Que j’oublie complètement
ces dernières semaines, reprendre ma névrose quotidienne,
sans espoir, mais dynamique. Je bougeais bien plus, je courais bien
mieux lorsque je n’étais pas arrêté ou ralenti
sur telle ou telle. J’avançais en vitesse croisière
lorsque mes instants de bonheur se concentraient sur les apparitions
de la belle inconnue du bus. Morose
tout ça. Fatigant. Plus de nouvelles de certains gaillards de
bordel, pas envie de harceler, pas envie de faire chier. J’attends
qu’un sourire se lève, se révèle. Un
message, très tendre et étrange par son contenu, de la
belle Chloé accentue mon hystérie joyeuse du soir ; je
swingue dans l’appartement, chante comme ce con de Cruise dans
Risky Business, en caleçon glissant sur mon carrelage, posé
par moi et le père d’Arnaud.
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