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J'invente
toujours des pires scénarios où je bute des connards,
avec délectation. Avachi sur mon canapé, mon si fidèle
canapé blanc, je repense aux merdeux que je rencontre tout le
temps ; quand je ne pense pas à des nibards aperçus lors
de mes déambulations urbaines, je pense à buter un max
de couillons.
Ce midi, après avoir maté la fin d'un épisode de
la "petite maison dans la prairie" chez mes grands-parents,
chez lesquels j'avais pris de quoi me faire des pâtes à
la carbonara, j'ai retrouvé un putain de chat chez moi.
Il a filé vite fait, bien avant de voler en éclats sur
le mur d'en face. J'ai repéré les lieux, il n'avait pas
pissé ; la pisse de chat est l'un de mes plus abominables cauchemars.
Par contre, j'ai découvert des traces de pattes dans mon armoire,
une femelle qui cherchait un endroit pour mettre bas.
Je repense à ce matou de merde ; que j'aurais pu jeter par la
fenêtre, à l'esclandre de son maître alerté
par une voisine mégère. J'imagine qu'il serait venu me
menacer, que je lui aurais parlé de tous ces gens, vieux français,
croupis sur des bouches de métro, que je rencontre chaque jour,
de ces pubs pour ce chien empereur de merde aussi, que je m'en foutais
de son chat, de sa chatte, et que face à de tels connards, je
considérais que l'homicide était un humanisme. Et là
je le détruisais dans une fulgurance de coups, finissant dans
le puit d'en face, sous le si beau rosier aux fleurs rouges.
Mais je n'ai pas jeté ce chat, et le con n'est jamais venu se
faire exterminer. J'écoute un concert de Bjork ; dehors, dans
le village, un minable chante du Pagny. C'est la fête de la musique.
Pour moi, c'est une journée à me branler. Je n'arrive
pas à me mettre devant le clavier.
J'écris un mail à Ovidie, mon seul labeur d'écrivaillon
du jour. J'ai dû mater un film aussi, mais je ne m'en souviens
plus.
Presque pas de mails, pas de courriers, une invitation à un repas
de l'association des Amis de Brasillach ; je n'y suis jamais allé.
J'écris un mail à Fanny, j'hésite entre un "adieu"
puéril ou un "pitié" tout aussi pathétique.
C'est con les faibles.
"Je
pense si souvent à toi. Encore un "12" de passé
; nous devions nous voir tous les "12" de chaque mois, te
souviens-tu ?
Bizarrement, ce sont tes cheveux qui me manquent le "plus",
ou est-ce ce trait que je retrouve le plus souvent dans les foules bigarrées,
cet instant d'arrêt, de peur et de joie mêlées, ou
je pense t'avoir retrouvé.
Mais non, tu as totalement disparu, même en mail.
Alors je bosse et je t'oublie ; je lance une revue, je m'y attèle,
j'écris, je propose à d'autres, je t'oublie un peu, aussi,
mais ce n'est pas assez encore.
Écrire pour oublier, je ne peux me résoudre à me
saouler, à me droguer, à forniquer de bien moins jolies,
j'emmerde ce monde putride. Je m'attache à des détails
de bonheur, une mèche de cheveux similaire, une silhouette, une
voix, un regard, qui me souviendrait à toi.
Les madeleines se digèrent mal. Elles se bloquent dans la gorge
et empêchent de respirer.
Tu
me manques,
SM"
J'ai
la voix du boucher dans la tête ; "alors boucher, tu vas
pas te faire emmerder par tous ces connards ?!"
Je me repasse le début de "Seul contre tous", la scène
de la présentation, moins drolatique que les portraits de Jeunet.
Cette petite voix, donc, je l'entends souvent. Je pénètre
dans une rame de RER à 19h02, quai de Val de Fontenay. Je me
retrouve entre une noire, une négresse, une black, une africaine,
peu importe le nominalisme, enfin une dame qui pue, qui pue fort et
mal, et un mec qui mâchouille, une bonne tête de veau, de
syndicaliste, de fonctionnaire, le regard loanesque. L'envie de l'exterminer,
je préfère encore la fatma qui pue. Je lui tourne le dos,
à ce connard masticateur.
Mon regard se pose sur un gros lard, hybride sirupeux de Dilbert, chemise
blanche et cravate. Un regard tout aussi expressif que le jeu d'acteur
de Samuel LeBihan.
J'essaie de penser à autre chose qu'un bain de sang, qu'une rame
infernale. Je cherche une petite mignonne, une mèche, un décolleté,
un cul…
J'aperçois une petite blonde au haut ouvert, de petits seins
se devinent, une jolie peau s'admire. Mais ce n'est pas satisfaisant.
Il y a rarement de jolies filles dans les transports en commun. La laideur
est plus commune que la grâce.
Par contre, j'aime bien mater les beaux seins des moches. Je trouve
ça marrant de découvrir une jolie paire de nibards sur
le corps d'une fille au visage infâme, au cul énorme ou
appartenant à une vieille.
Ça me fait toujours marrer de voir que la vie est si malicieuse.
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