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Jai la classe. Jai un livre Gallimard dans mon petit sac
branché. Jai une barbe tendance, à la " Édouard
Baer ". Jai un costard Bill Tornade bleu électrique
ou violet dessiné pour ma silhouette longue et fine. Jai
une carte bleue. Et une paie sur mon compte.
Mais je suis bien mal à laise.
Loin de moi lidée de frimer, ou de me la jouer. Je suis
un si grand " looser " (perdant en français). Mais
je suis à la " Libé ", et je me sens mal. Jai
lair dun minet, dun pédé, dun
bourgeois, et je ne le suis pas. Il y a des rockers, des tronches, des
jeans, des sweats, des chemises, des crânes rasés, des
cheveux gras, des gars tranquilles.
Et je suis là avec mon costard à 3000 balles (ancienne
monnaie). Avec la flippe de me voir renverser une bière dessus,
ou de me faire cramer par une clope traîneuse.
Cyril
discute avec des amis. Je nose pas trop bouger. Pas trop me faire
remarquer, davantage. Cest à ce moment-là que trois
personnes entrent dans le bar, trois personnes qui ne me portent pas
dans leur estime, et cest bien réciproque. Jai même
commencé le premier, dans mes écrits.
Ils me disent " bonjour ", avec la tête qui ne va pas
avec. Je réponds aussi " bonjour " sans trop y croire.
Cest ennuyeux. Jaurais préféré que
lon signore. Pas dhypocrisie. La prochaine fois je
leur dis. Merde !, quand je rentre dans le café, je ne salue
pas tout le monde, un bonjour général, et je serre la
poigne de ceux que japprécie, par dieu.
Je me sens encore plus mal. Je me casse pour aller grailler un "
Turc " ; oui même à Coulommiers, je succombe à
la sauce blanche et à la graisse sur mes côtes.
Je rencontre Pablo, qui me parle, qui me parle. Cest un plaisir.
Cest un plaisir. En discutant de livres, de sa boutique, de ses
embrouilles avec une femme, puis la mairie (Guy Drut), nous croisons
Pascale (légérie de la chronique " Les Sources
"), et Marina, une ancienne élève, devenue secrétaire
de mairie à Chevru, là où habite Christine (égérie
de bien plus dune chronique).
Je
prends une assiette, sur place donc. Jattends que le temps passe.
Derrière moi, un pote de la " Libé " mange tout
seul avec une bouteille de rouge. Je préfère le laisser
tranquille, pour être tranquille aussi. Je repense à ma
semaine. Bizarre.
Je pense à Sébastien dOttawa, et au gentil mail
de son amie Laura, qui me disait que je nétais pas "
moche ". Bien.
À mes échanges de mails de laprès-midi avec
Nathalie, une si vieille amie. Nathalie. Stéphane, Cédric,
Fabien. Tout ça est si loin, et proche toujours. Jai toujours
pensé que cest delle que jaurais dû tomber
amoureux et pas de cette gourde dIngrid. Mais voilà, ce
nest pas de la logique.
Plus de deux ans sans la voir, et elle pense à mon anniversaire.
Cest la preuve quelle aime toujours, comme quoi ? Vieux
pote, vieux confident, comme moi, par logique.
Je pense aussi à Régis que je narrive plus à
voir en raison de mes retours quotidiens en cambrousse, à NEO
que jai loupé à sa dédicace de jeudi soir,
à Martin Page que je dois rappeler (heureusement que jai
pensé à faire le 3103), à Bénédicte
que je nai pu appeler dans la semaine, déprimé que
jétais, et sans le sou aussi.
Je pense aux mails très forts de VTC et à celui dETC,
qui mouvre de grands espoirs. Et du labeur.
Je pense à " Vincent Delerm " que jai écouté
des dizaines fois pour préparer larticle pour Tébé
; ai lu trois romans, ai lu des pages sur le théâtre, sur
la " Nuit Blanche " le 5 prochain.
Pour mon plaisir, jai tout de même lu et aimé "
Inversion de lidiotie " de Foenkinos.
Sur
Vincent Delerm, " Vincent Delerm ", chez Tôt ou Tard
On
partage en un album de quelques chansons l'ennui du petit Vincent Delerm.
On dîne chez ses beaux-parents druckeriens, on lambine dans la
vie, le vie est bien mélancolique, en se demandant ce que le
passé nous réserve. On regrette le temps de l'innocence,
de l'enfance et du petit ours en peluche et de l'album colorié.
Comme le temps passe, et le bonheur s'éloigne.
Pour un oui ou pour un non, Vincent nous écrit des poèmes
qu'il chante avec nonchalance, et une voix grave. Mais rien de grave
dans ces instantanés de vie, de moments de bonheur.
Il joue avec ses références, il nous touche avec la voix
de Jean-Louis Trintignant et la tirade mythique de "Un homme et
une femme" (1966) de Lelouch. Il avoue qu'il s'agit là du
seul film qu'il aime revoir de Lelouch, nous le comprenons (mais "L'aventure
c'est l'aventure" est assez jubilatoire quand même).
Vincent se sent plus proche de l'univers de Truffaut, "Vivement
dimanche" (1983), dernier film de Truffaut avec Fanny Ardant et
Trintignant. D'ailleurs, Vincent est l'homme qui aimait les femmes,
Fanny Ardant, ou bien Irène Jacob, elle chante en compagnie du
poète chanteur.
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